Cliente satisfaite

Qu’est-ce-qu’un(e) client(e) ?

Nicolas Bariteau

Écrit par Nicolas Bariteau

Expérience client, expérience utilisateur, communautés, le temps est loin où le client se réduisait à un acte d’achat et à une relation commerciale qu’il faudrait maintenir active à tout prix pour générer toujours plus de chiffre d’affaire.

Le terme client tire son origine du latin cliens qui signifie serviteur. En effet, dans la Rome antique, un client était un homme libre qui se plaçait sous la protection d’un patron bienfaiteur, plus puissant que lui.

De là à dire que le client devrait se mettre au service des marques et des entreprises pour leur rapporter toujours plus de valeur, d’argent en particulier, il n’y a qu’un pas que beaucoup ont franchis; celui qui conduit à envisager le marketing comme le moyen de satisfaire les résultats de l’entreprise plus que le client. 

Comme le dit Seth Godin dans son article  What Your Dog Knows About Marketing« People don’t want what you sell; they want how your product makes them feel. » Les gens ne veulent pas de ce que vous vendez; ils veulent ce que votre produit leur fait ressentir. Ou comme le disait le célèbre professeur de marketing de Harvard Theodore Levitt, “People don’t want to buy a quarter-​inch drill bit. They want a quarter-​inch hole.”

Autrement dit, vos clients veulent que vous puissiez satisfaire leurs besoins et que vous proposiez une solution satisfaisante à un problème qu’ils rencontrent. Et non que vous restiez (con)centré avant tout sur votre produit ou service, au risque de ne pas satisfaire le besoin ou résoudre la problématique de votre client.

Cette idée de l’assujétion du client à un tiers demeure toujours dans le monde informatique dans lequel le terme désigne une machine cliente, ou son utilisateur, qui accède à un service fourni par une machine distincte, un serveur par exemple. C’est le cas lorsque vous utilisez le navigateur Web (client) de votre ordinateur pour vous connecter à un site ou un service Web comme Google (hébergé sur un serveur).

En revanche, en marketing et en économie, le terme client désigne celui qui choisit d’accepter ou de refuser l’offre d’un tiers, et non celui qui se met au service d’un autre. Nous sommes passé d’une situation de dépendance à celle d’une interdépendance, où la valeur pour le client profite à celle du fournisseur de l’offre, et inversement. 

En marketing digital c’est ce que l’on appelle avoir une approche user centric, centrée sur l’utilisateur, et qui conduit aujourd’hui à parler d’approche customer centric, centrée sur le client, ou consumer centric, centrée sur le consommateur.

Les gens ne veulent pas acheter un foret de 0,6 cm. Ils veulent un trou de 0,6 cm.

Theodore Levitt quarter-inch-drill Theodore Levitt

La revanche du client

Dans les années 1990, dans une société de plus en plus individualiste, un mouvement de bascule s’effectue qui amène le client à s’affranchir de sa servitude et conduit les marques à rechercher la satisfaction de leurs clients. Le marketing personnalisé, appelé aussi one-to-one se développe fortement. Les consommateurs sont découpés en segments toujours plus fins. Un seul mot d’ordre, satisfaire les besoins de chacun dans une société de consommation de plus en plus individualiste dans laquelle la consommation de masse s’oriente progressivement vers un consommation de niches, les tribus de Seth Godin. L’arrivée du Web et la généralisation de l’usage d’Internet à partir de 1993 va peu à peu entériner le nouveau paradigme des tribus et du client roi. Une course effrénée est engagée par les marqueteurs pour satisfaire sa demande, identifier ses envies, anticiper ses besoins grâce aux milliards de données comportementales collectées en temps réel grâce à la toile. Le client roi et la cliente reine deviennent des consom’acteurs qui, par leurs avis, leurs recommandations et les notes qu’ils distribuent sur la toile, ont droit de vie ou de mort sur les biens et services qu’ils consomment.

Le client roi 

Un client ne se réduit pas à un acte d’achat ni à une relation commerciale qu’il faudrait maintenir active à tout prix pour générer toujours plus de chiffre d’affaire. Un client exprime ce qu’il est ou ce qu’il voudrait être, mais aussi ce qu’il n’est pas à travers ses choix de consommation, les marques qu’il revendique apprécier ou détester. Son choix peut être dicté par :

  • Le rôle statutaire de l’objet de consommation, comme une voiture, un smartphone, certains vêtements; ce qu’il consomme convoque l’adhésion ou le rejet de ses pairs, et par là même la représentation qu’il veut que les autres aient de lui. 
  • Le sentiment d’appartenance à une tribu, un groupe avec lequel il  partage un certain nombre de valeurs ou de référents culturels; une génération par exemple.
  • Le conformisme; faire comme tout le monde est plus simple, renforce le sentiment d’appartenance à la majorité des consommateurs, et lui confère un statut de normalité en son sein.

La cliente reine

Les choix de consommation des clients ne sont donc pas neutres. Ils sont motivés par trois besoins différents et exclusifs liés à la recherche de :

  • Un bénéfice moral – un symbole statutaire permettant au consommateur d’affirmer sa personnalité, son individualité, pour mieux s’intégrer à un groupe social ou au contraire s’en extraire,
  • Un bénéfice social – par l’acquisition d’un bien ou l’utilisation d’un service représentatif d’un groupe de pairs et facilitant l’intégration en son sein,
  • Un bénéfice matériel – le manque de ressources financières conduit à n’envisager la consommation que sous l’angle de la subsistance et la satisfaction de besoins essentiels pour survivre.

La consommation dans les deux premiers cas est un acte conscient dans lequel le client, par son action, témoigne de ses convictions et de son positionnement au sein de la société. Dans le troisième cas, son comportement de consommation est le résultat de contraintes économiques ou de la recherche de son optimisation.

Paradoxalement, le client roi est redevenu serviteur, à moins qu’il n’ait jamais cessé de l’être. Esclave de ce nouveau capitalisme de surveillance exercé par Amazon, Google, Facebook ou Microsoft, ses moindres recherches, actions ou hésitations sont captées et analysées pour dresser son profil et l’enfermer dans une bulle de filtrage sans qu’il en soit conscient. Les plateformes numériques jouent le rôle du bienfaiteur et l’internaute consommateur celui du serviteur « libre »…de penser qu’il l’est.

Les gens ne veulent pas de ce que vous vendez; ils veulent ce que votre produit leur fait ressentir.

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